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Trouvé sur internet : http://perso.wanadoo.fr/roches-ornementales/Trento.html
Le porphyre de Trente
PERRIER R., Le Mausolée, n°747, novembre 1998, p. 62-70
Depuis quelques dizaines d'années, le
porphyre rouge de Trente (porfido rosso di Trento) s'est imposé
dans presque toutes les villes de France pour la rénovation des zones
piétonnes, sous forme de pavés, dalles et bordures. Chacun de nous a
marché sur ce porphyre, sans nécessairement connaître sa provenance : il
est facilement reconnaissable par sa couleur rougeâtre et son grain plus
fin que celui du granite. Nous avons cherché quelles étaient les raisons
de ce succès, en rendant visite en juin 1998 aux carrières et
entreprises de la région de Trente.
1 - Historique et production
Le mot porphyre provient du grec
porfura,
d'après le nom d'un gastéropode (Murex) produisant une teinture pourpre
(rouge-violacé) ; il a été transcrit porphyra en latin avec la
même signification.
Les porphyres les plus connus dans
l'Antiquité étaient :
- le Porphyre Rouge Antique
d'Egypte, ou Porphyre Impérial, extrait du Djebel Dokhan dans le désert
oriental ; dans cette roche ont été taillés de nombreux sarcophages
impériaux à l'époque romaine et byzantine, ainsi que huit grandes
colonnes de Sainte Sophie à Istanbul. Sa coloration est attribuée à une
épidote rouge, la thulite.
- le Porphyre Vert Antique de Crocée
dans le Péloponnèse, est en fait une andésite triasique dont les
feldspaths ont été transformés en épidote verte (pistacite); il a servi
aux crétois et mycéniens à confectionner de petits objets, la carrière a
été reprise à l'époque romaine, où l'on a pu extraire des blocs un peu
plus grands, comme ceux ayant servi à tailler des colonnettes spirales
(Saint Jean de Latran).
En Suède les porphyres d'Alvdalen,
ont été découverts au XVIIIe siècle par le roi Gustave III ; de couleurs
très variées, ils ont servi à tourner des vases (jusqu'à 3000 litres de
capacité), et à fabriquer des objets décoratifs, jusqu'au sarcophage de
16 tonnes du comte Bernadotte, roi de Suède.
Dans la région de Trente, les coulées de
porphyre quartzifère ont longtemps été employées à l'échelle locale
comme simple pierre de construction, comme dalles pour les cuisines et
aussi comme lauzes de couverture ; on signale ainsi que l'ardesia di
Pinè couvrait la cathédrale de Trente en 1774. On ne semble pas les
avoir utilisées pour des usages décoratifs.
Vers 1880, encore à l'époque autrichienne,
on commence à fabriquer des pavés dans le Haut Adige, pour le pavage des
routes militaires (col du Brenner). La première concession dans la
région d'Albiano est attribuée en 1911, puis des concessions plus
importantes sont accordées à des entreprises milanaises par la commune
d'Albiano en 1924, ensuite par celle de Fornace : elles produisent pavés
et bordures.
A cette époque, l'abattage se fait à l'aide
de leviers (palanchini), parfois par des fourneaux de mines :
dans ce cas on creuse une galerie étroite, longue d'une dizaine de
mètres, et se terminant par deux petites galeries perpendiculaires dans
lesquelles est placé l'explosif. La quantité de poudre devait être
soigneusement évaluée pour abattre la roche sans la fracturer
exagérément et sans projeter la pierre à distance. Les blocs sont
découpés aux coins pour les rendre transportables, puis placés sur un
banc de travail d'environ 1 m2, recouvert de déblais : les
ouvriers découpent alors plus commodément les dalles en pavés ou
bordures. Pour cela ils gravent au ciseau un sillon sur une face de la
dalle, puis la retournent, quelques coups de marteau appliqués au niveau
du sillon suffisent pour découper la dalle. En 1931 on compte 52
carrières avec 800 ouvriers, produisant 90 000 t de pavages et 23 500 t
de pierres de construction. Les premiers camions assurent le transport
jusqu'à la gare de Trente.
Après la dernière guerre, les besoins pour
la reconstruction des villes italiennes bombardées s'intensifient, la
production augmente, atteignant 200 000 t de pavages en 1962 pour
l'ensemble de la région, sans que les techniques changent. En 1964 les
concessions d'Albiano données aux grosses sociétés milanaises viennent à
échéance, les municipalités propriétaires des terrains mettent aux
enchères de plus petites parcelles, pour une durée de 9 ans,
privilégiant les petites entreprises locales et les coopératives
ouvrières. L'introduction des pelles mécaniques et chargeurs rend
obsolètes les rails, wagonnets et téléphériques, et augmente la
productivité. Dans les années 70, l'abattage par leviers et fourneaux de
mines est remplacé par des tirs dans des trous parallèles, forés au
marteau perforateur, verticalement et horizontalement ; les premières
machines mécaniques ou hydrauliques de fendage accélèrent la découpe des
dalles et pavés. Des ateliers de sciage et polissage apparaissent.
En 1972 la presque totalité des producteurs
se regroupent dans l'Ufficio del Porfido, qui assure la promotion
de la roche par tous les moyens (publications, participations aux
expositions...) ce qui assure l'ouverture de marchés extérieurs, surtout
l'Allemagne, la France, la Suisse et l'Autriche. Actuellement l'Ufficio
del Porfido est devenu l'Ente Sviluppo Porfido (ESPO) et
coordonne l'ensemble du secteur, tandis que les activités commerciales
et de production sont assurées par les consortiums d'Albiano et de Pinè.
Après une forte augmentation de l'activité
au cours des années 1970 et 1980, la production s'est stabilisée autour
de 1,12 Mt /an de produits de voirie dans les années 90, la production
de pierres de taille étant devenue minime. L'extraction se fait surtout
dans la région d'Albiano, sur les communes d'Albiano, Lona-Lases,
Baselga di Pinè et Fornace : on y dénombre 85 carrières, 215 entreprises
d'extraction et transformation, 200 entreprises de pose. Au total cette
activité assure 3500 emplois directs dans la province de Trente,
assurant une activité économique non négligeable, alors que d'autres
industries sont en déclin.
D'autres carrières ont été actives dans le
même bassin : il existait 19 carrières en 1970 dans les environs de
Bolzano et Predazzo, il ne resterait qu'une petite carrière à Bolzano et
une à Predazzo.
2 - Le bassin des porphyres
Les porphyres se sont formés dans un graben
(fossé tectonique) résultant d'un effondrement postérieur à la formation
de la chaîne hercynienne. De multiples et abondantes éruptions
volcaniques s'y sont produites au cours du Permien inférieur il y a 260
millions d'années, à peu près à l'époque où se formait le graben d'Oslo
en Norvège, producteur des célèbres "labradors" de Larvik.
Le graben de Trente s'étend sur 7500 km2,
sa forme est en gros triangulaire, avec une longueur de 180 km du lac d'Idro
à la frontière autrichienne, et une largeur maximale de 70 km. Les trois
quarts du bassin sont en fait cachés sous le Trias des Dolomites et des
Alpes du Sud.
Fig.
2 - Production de la région de Trente de 1922 à 1970
La plus grande épaisseur de formations
volcaniques, de l'ordre de 2000 m, se situe entre Bolzano et Predazzo..
Le volcanisme est d'un type très particulier, puisqu'il s'agit
principalement d'émissions d'ignimbrites (voir plus bas).
La stratigraphie de la série volcanique est
assez complexe, avec au dessus d'un conglomérat de base appelé
Verrrucano, cinq effusions ignimbritiques principales : les deux
premières sont de composition plus basique (latitique à rhyodacitique),
et de couleur rouge sombre à vert, les trois suivantes sont de nature
purement rhyolitique (c'est à dire comparables à celle des granites
vrais) avec une couleur gris à rouge violacé. En fait seule la coulée
supérieure, qui n'a pas été transformés par altération hydrothermale,
est exploitable, son épaisseur varie de 100 à 200 m.
Les ignimbrites sont séparées par des
coulées ou des dômes de laves, des tufs volcaniques ou des dépôts
lacustres ; elles sont traversées par des cheminées volcaniques et des
filons à sulfures, quartz, fluorite, baryte, etc.
Dans la masse d'ignimbrites exploitée, la
fracturation est caractérisée par des diaclases subverticales, espacées
de 1 à 50 cm. De ce fait, la roche se délite facilement en plaques, ce
qui favorise particulièrement la fabrication de dalles et pavés.
L'origine de ces diaclases est controversée, pour les uns il s'agirait
de fractures tectoniques liées à l'orogénèse alpine, pour les autres de
fractures de refroidissement de la coulée. Ayant observé des figures
plumeuses sur la surface des fractures, notamment dans une
carrière de Fornace (fig. 8), nous penchons plutôt pour la première
hypothèse, car ces figures sont caractéristiques des fractures
d'extension.
3 -Pétrographie et propriétés physiques
Rappelons d'abord que le terme de porphyre
n'est plus employés par les pétrographes actuels, sinon pour
caractériser la texture d'une roche : une texture porphyrique
comporte de grands cristaux automorphes dans une pâte à grain plus fin,
elle est fréquente dans les granites.
Le porphyre de Trente (dénomination
commerciale) correspond à une rhyolite, équivalent volcanique des
granites. Le composant principal (50-55%) est une matrice vitreuse, de
couleur verte ou rouge, ayant les caractéristiques d'un verre fondu.
Aussi la découpe des plaques s'apparente-t-elle à la découpe du verre à
vitres : on grave une rainure sur une face, on retourne la plaque et
quelques coups de maillet appliqués à l'opposé de la rainure fendent la
plaque ; il est même possible d'effectuer des découpes sinueuses. En
fait la matrice est souvent dévitrifiée, c'est-à-dire finement
recristallisée en petites aiguilles et sphérules avec petits cristaux de
quartz, tridymite (variété de quartz de haute température), feldspath
alcalin, chlorite... On note également des restes déformés d'écailles
vitreuses à structure fluidale.
Dans cette matrice sont dispersés des
cristaux de 0,5 à 5 mm de feldspaths et de quartz. On reconnaît des
feldspaths potassiques (sanidine) de couleur rouge (15-20%), des
plagioclases en lattes blanches (andésine, 15-20%), des quartz
translucides assez gros (20%), des biotites chloritisées (6-8%). Ces
phénocristaux montrent souvent des golfes de corrosion.
La composition chimique moyenne
montre une forte teneur en silice et un faible pourcentage de chaux:
Parmi les principales propriétés
physiques, relevons :
On remarquera la forte différence de
résistance à la compression entre échantillons cubiques et cylindriques,
ce qui signifie qu'il faudrait des échantillons de forme et de taille
identique pour comparer des roches différentes. Quoi qu'il en soit la
résistance à la compression du porphyre est élevée, n'étant dépassée que
par celle des diabases et des quartzites.
La dureté est également élevée par rapport à
d'autres roches, cependant sa mesure par la moyenne des empreintes d'un
indenteur Vickers est une méthode contestable.
La résistance à l'usure est effectuée par
une méthode propre à l'Italie (valant 1,51 fois celle de la roche de
référence, le granite de San Fedelino), et impossible à comparer aux
mesures faites dans d'autres pays, mais il n'y a pas de doute qu'elle
soit excellente.
La résistance au gel est estimée en Italie
par la différence entre les résistances à la compression avant et après
20 cycles à -15°C : le matériau est considéré comme ingélif si la
résistance diminue de moins de 25 %. Selon Tomio et Filippi (1998) la
résistance passe en moyenne de 221,5 à 202,6 Mpa, soit une chute de 8,5
% seulement. Par contre selon les résultats de Cardu et al. (1991) la
résistance passe :
- de 161 à 86,2 Mpa sur échantillons
cubiques (- 46,4 %)
- de 209 à 195,3 sur échantillons
cylindriques (-6,5 %),
ce qui signifierait que les produits
cubiques sont gélifs ! Ici encore la parution de normes européennes est
hautement souhaitable.
4 - Les carrières de la région d'Albiano
Ce sont les plus importantes de la province,
elles se répartissent sur les communes d'Albiano, Fornace, Baselga di
Piné et Lona-Lases. Des carrières moins importantes nous ont été
signalées près de Bolzano (Bronzolo, Valle Sarentina) et de Predazzo.
Fig.
3 - Vue de la route d'Albiano vers le nord, anciennes carrières de
porphyre sous le village de Verla. Au dessus du village, le porphyre est
recouvert par les dolomies du Permien supérieur (formation à Bellerophon)
Elles sont implantées sur des flancs de
vallées à forte pente, couverts de belles forêts de conifères. Malgré
cet environnement sensible, les mouvements écologistes ne posent pas de
problèmes selon les producteurs, il semble admis que la production de
porphyre est une activité vitale pour la région.
Les carriers obtiennent des communes de
petites concessions, larges d'une cinquantaine de mètres ; ils paient
une redevance qui doit permettre aux communes la remise en état des
terrains dans le futur. Une grande carrière comme celle d'Albiano
comprend plusieurs concessions côte à côte.
Les carrières ont débuté au bas des pentes,
elles sont organisées en gradins assez élevés (de l'ordre de 25 m),
communs aux divers exploitants. La couverture est un sol végétal de
quelques mètres seulement, au voisinage duquel les surfaces de fractures
montrent des teintes mordorées d'oxydation, et parfois des débuts de
glissement sur les versants (fauchage, fig. 7).
Fig.
7 - Fauchage replissant la fracturation à Albiano, partie Nord ; le
fauchage résulte de glissements sur les versants altérés
L'abattage se fait par tirs de
dynamite-gomme dans des forages horizontaux de 15 cm de diamètre,
profonds de 6 à 7 m, espacés de 1 à 1,5 m : ils sont dirigés de
préférence perpendiculairement à la fracturation. Quelques tirs dans des
forages verticaux aident au basculement de la masse. Le tri des dalles
se fait aussitôt, toutes celles comportant des fractures non ouvertes
sont clivées aux coins ; les dalles épaisses (20-30 cm), abondantes à
Albiano dans le gradin supérieur, servent pour les pavés de grandes
dimensions, et accessoirement comme pierres de construction. Les dalles
de 2-3 cm, plus nombreuses dans le gradin moyen, d'une surface de 1 à
1,5 m2, sont réservées à la production de revêtements de sols
et murs, elles sont placées dans des bennes que des camions transportent
aux ateliers ; celles de petite taille sont immédiatement empilées sur
palettes pour les sols en opus incertum.
Les déchets sont concassés dans une
installation voisine pour la fabrication de béton ou les fondations de
routes, ou portés à une décharge commune située dans un vallon voisin.
Le rendement est de 30 à 50% selon les sources.
5 - Les ateliers de transformation
Ils sont pour la plupart implantés sur le
plancher des carrières, mais il en existe d'autres situés au sommet de
certaines carrières ou dispersés dans la région.
L'activité majeure est la fabrication de
pavés et bordures ; les camions déversent les dalles épaisses sur une
plateforme allongée, en contrebas de laquelle sont placés les postes de
fendage, au nombre de 10 ou 12. Chacun d'eux est équipé d'une presse
avec couteaux garnis de carbure de tungstène ; le couteau supérieur est
actionné par un vérin hydraulique, mais il existe encore des modèles
dans lesquels l'entraînement du couteau est mécanique, par le moyen
d'une courroie débrayable. Les pavés sont stockés sur le sol selon leurs
dimensions, puis chargés dans des grands sacs en tissu plastique, ou
bien directement placés dans des bennes métalliques qui seront
transportées vers le lieu de pose par des camions-bennes.
Les dalles de faible épaisseur et de surface
convenable sont découpées dans des ateliers par des presses ou sciées au
disque diamanté.
On remarque également sur les chantiers des
tranches polies de 2 ou 3 cm d'épaisseur, elles proviennent de sciage au
châssis, opération qui est exécutée ailleurs et revient assez cher du
fait de la dureté du porphyre.
Fig.
9 - Quelques uns des ateliers sur le plancher de la carrière d'Albiano
Fig.
10 - Découpe de dalles épaisses à la presse hydraulique pour la
fabrication de pavés
6 - Les produits et leurs applications
Les pavés cubiques (cubetti)
représentent sans doute la plus grosse part de la production ; selon
l'épaisseur des dalles on les produit en 6 dimensions normalisées, la
face apparente du pavé ou tête étant toujours une surface de fracture
naturelle, les côtés découpés à la presse étant plus irréguliers :
Le premier type sert au pavage de zones
piétonnes et jardins, les suivants pour les zones à circulation de
véhicules.
Les variations de dimensions à l'intérieur
d'un type donné permettent de prendre en compte les réductions de taille
nécessaires à la pose en arches ou en queue de paon ; pour ce qui
concerne les dessins possibles et la mise en oeuvre, on se reportera aux
ouvrages de très documentés de Tomio et Filippi (1998) et Angheben
(1997)publiés par ESPO.
Les pavés rectangulaires (binderi)
sont des dalles épaisses (5 à 20 cm) découpées en rectangles de 10 , 12
ou 14 cm de large, avec une longueur libre. Elles servent à réaliser des
bandeaux délimitant les zones pavées de couleurs différentes, ou bien
des pavés allongés en rangées parallèles.
Les bordures de trottoirs (cordoni)
ont une largeur de 5 à 12 cm, pour une hauteur de 20 à 30 cm (longueur
libre). Les cordoni a spacco sont obtenus par découpe au moyen de
puissantes presses, la face supérieure est soit le plan de fracture
naturelle soit le plan de découpe selon les modèles. D'autres modèles
ont la face supérieure ou le côté visible sciés, les faces apparentes
étant ensuite rendues rugueuses par sablage, flammage ou bouchardage.
Les dalles irrégulières (lastrame
irregolare), pour pose en opus incertum (ou palladien), sont
normalisées en ce qui concerne les épaisseurs et les longueurs
minimales.
Les dalles tranchées (piastrelle
tranciate) sont découpées à angle droit à la presse ; leurs bords
étant irréguliers (tolérance
± 1 cm), elles
sont mieux adaptées à la pose en extérieur; les largeurs varient de 5 en
5 cm entre 10 et 35 cm, avec des longueurs libres. L'épaisseur est de 2
à 5 cm pour les modèles normaux, de 5 à 8 cm pour les dalles épaisses
devant faire face au passage de véhicules.
Une variété appelée smolleri est
destinée à être posée sur la tranche, pour éviter que les voitures ne
dérapent sur les chemins d'accès à forte pente.
Les dalles naturelles sciées (piastrelle
piano naturale e coste fresate) ont une épaisseur variable dépendant
du parallélisme des fractures naturelles ; les épaisseurs sont
regroupées en 2 à 5 cm, 3 à 7 cm, 5 à 8 cm, les premières étant les plus
fréquentes. Les largeurs vont de 20 à 40 cm, avec une longueur libre. Il
est possible d'obtenir des dimensions fixes, jusqu'à 30 x 60 cm.
Les dalles sciées (piastrelle
piano sega) sont obtenues par sciage au châssis ou au disque sur
leurs 6 faces, elles peuvent être sablées ou polies ; dans ce dernier
cas le polissage fait ressortir les variations de couleur, il est
impossible d'assurer l'homogénéité chromatique.
Les ateliers assurent aussi la fabrication
sur commande de marches d'escaliers et d'accessoires divers de voirie,
ainsi que de pierres de taille tranchées ou sciées.
7 - Conclusion
Le porphyre de Trente, en réalité une
rhyolite mise en place par des éruptions ignimbritiques au Permien
inférieur, a une extension considérable : les réserves géologiques sont
immenses, les réserves exploitables ne sont limitées que par les
conditions d'accès et la politique des autorités.
Cette roche très dure et résistante à
l'abrasion permet la production de dalles et de produits de voirie à des
prix compétitifs, grâce à une fracturation naturelle subverticale assez
régulière, dont l'origine tectonique est probable. L'existence de ces
fractures plus ou moins parallèles permet de faire l'économie de deux
coupes pour un produit parallélépipédique à six faces. Si la roche était
massive, son abattage et son sciage ne seraient sans doute pas
économiques. Cette fracturation discontinue est tout à fait différente
d'une fissilité pénétrative comme celle des schistes et ardoises.
Au cours du façonnage, les ouvriers doivent
ouvrir au coin et au maillet toutes les fractures existantes, faute de
quoi elles pourraient s'ouvrir sous l'effet du gel. Les surfaces de
fractures naturelles sont antidérapantes, même par temps de pluie, et
très résistantes à l'abrasion mécanique et aux attaques chimiques comme
en témoigne leur emploi pour les couvertures anciennes en lauzes et dans
l'industrie chimique.
Il existe deux teintes prédominantes,
rougeâtre et gris-verdâtre, qui peuvent être alternées pour la pose de
pavés. Les surfaces résultant de découpes à la presse étant plus
rugueuses que les faces naturelles, celles-ci sont posées apparentes. Le
porphyre peut aussi être scié sur une ou plusieurs faces : dans ce cas
on le rend antidérapant, comme les faces naturelles, par sablage,
flammage ou bouchardage.
Le porphyre prend un bon poli, mais alors
les variations de couleur et les traînées claires deviennent beaucoup
plus apparentes, on ne peut obtenir de couleurs unies.
Le succès du porphyre en Europe résulte des
propriétés physiques et chimiques propres à cette roche vitreuse, mais
aussi des regroupements de producteurs qui permettent une promotion à
grande échelle, la coordination de la production et de la
commercialisation, comme le Consorzio Cavatori Produttori
Porfido sis à Albiano.
Références Angheben A, 1997, La posa in opera del porfido, éditions e.s.PO, Albiano. Cardu M. et al., 1990, I porfidi del Trentino, Boll. Assoc. Mineraria Subalpina, 27/1-2, p.99-117. Tomio P. et Filippi F., 1998, Il manuale del porfido, éditions e.s.PO, Albiano. NOTE SUR LES IGNIMBRITES Les ignimbrites (de ignis = feu et imber = pluie), autrefois appelées "tufs soudés", représentent un type particulier de pyroclastites, dépôts provenant de produits éjectés violemment par certains volcans. Ces roches se sont déposées en coulées épaisses de plusieurs dizaines de mètres, à la suite de l'explosion de volcans émettant des roches riches en silice, donc très visqueuses, de composition généralement rhyolitique, parfois trachytique ou phonolitique. Elles proviennent de l'émission d'un mélange à haute température formé de bulles de laves accompagnées de grandes quantités de gaz, qui déborde du cratère et se répand à grande vitesse (jusqu'à 360 km/h) et grande distance (jusqu'à plus de 100 km) en remplissant les reliefs de la topographie. Quand le flux turbulent ralentit, les aiguilles de verre volcanique et les cristaux isolés se sédimentent, la température atteignant encore 600 à 750 °C, si bien que les fragments de verres se soudent entre eux. Quand la coulée comprend des fragments de ponce, ceux-ci s'aplatissent et forment des disques dont la coupe dessine des "flammes", caractéristiques de certains niveaux des coulées ignimbritiques. Au sommet des coulées se trouvent des niveaux de ponces, qui se sont refroidies plus rapidement et ne sont pas soudées. Vu le grand volume de produits expulsés, on pense que ces éruptions sont liées à l'effondrement du toit de chambres de magmas granitiques, situées à quelques kilomètres de profondeur, dont résultent de grandes dépressions circulaires, les caldeiras. Lorsqu'au contraire les magmas riches en silice remontent calmement dans la cheminée volcanique, le dégazage est précoce et la lave s'élève lentement en forme de dômes ou coulées épaisses . Les phonolites pliocènes du Velay montrent de beaux exemples de dômes ; quelques uns de ces dômes ont été reconnus dans la série volcanique permienne de Trente. Parmi les plus grands dépôts ignimbritiques connus, citons ceux de la Vallée des Dix Mille Fumées en Alaska, les tufs de Kirsehir en Anatolie, les tufs du lac Toba à Sumatra |
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